La cour des innocents – Fabien Pesty
Le livre :
On y croise une famille de juillettistes dont le départ en vacances au moment du Tour de France prend une tournure inattendue, un grand bandit dont l’ascension et la décadence nous sont contées à travers une boite de cigares, des personnages à la mémoire qui flanche ou qui subissent la vieillesse de plein fouet. Certains font de « drôles » de rencontres, d’autres vivent dans un monde où être « décrocheur de toiles d’araignées », « envoyeuse de CV »… est un métier à part entière. Etc.
Fabien Pesty nous entraine dans son univers bien particulier avec des récits courts et variés. Il signe avec La cour des innocents, paru chez Paul&Mike, son premier recueil de nouvelles. Trois d’entre elles ont déjà remporté des prix littéraires*, les autres sont totalement inédites.
*Les valises a obtenu le 1er prix Jugon-les-Lacs 2010, La caissière du péage de Chatuzange-le-Goubet le 1er prix Fontaine-Française 2011 et Passage à tabac le Prix spécial du Jury du Prix Don Quichotte 2012.
Avis :
Si le secret du bonheur est l’oubli comme le suggère l’auteur dans son très touchant Fin mars, Fabien Pesty est, au contraire, un nom à retenir. Dans ce recueil de 15 histoires sombres, cyniques, décalées, absurdes ou loufoques, l’auteur joue avec les mots et tient le rythme d’un texte à l’autre avec un style vif, plein d’humour (noir) et d’intelligence. Il se paye même le luxe d’écrire une nouvelle inspirée de Jean de la Fontaine dans Jugement dernier où s’affrontent lors d’un procès arbitré par un Requin-Marteau les défenseurs de Dieu et de Darwin.
Un recueil qui se lit avec plaisir… On en redemande !
Musique:
La musique est assez présente dans le livre, on en trouve dans 10 des 15 nouvelles.
L’une d’entre elles, Roadhouse Blues, porte le nom d’une chanson des Doors dont elle est inspirée.
Une autre, Emmène-moi danser ce soir, est un titre de Michèle Torr.
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Playlist :
(références musicales par ordre d’apparition dans le livre)
Fin Mars
- Led Zeppelin – Stairway to Heaven (album Untitled aussi appelé Led Zeppelin IV, 1971). La chanson a été écrite et composée par Jimmy Page et Robert Plant. Le guitariste et le chanteur sont d’ailleurs évoqués dans la nouvelle. Malgré sa durée (près de 8 minutes) le titre a été la chanson la plus diffusée sur les radios américaines pendant plusieurs décennies.
- Deep Purple et les Sex Pistols sont cités en référence à des concours d’air guitare.
- Led Zeppelin – Whole Lotta Love (Led Zeppelin II, 1969). La chanson et des extraits de paroles sont cités plusieurs fois dans le texte. Ce morceau, le plus érotique du groupe, est inspiré de la chanson de Willie Dixon, You need love, Whole Lotta Love. Un titre repris par Mary J. Blidge (dans une version plus urbaine) et Carlos Santana.
Passage à tabac
- The Beatles – Happiness is a Warm Gun (album The Beatles, aussi appelé album blanc, 1968). Le narrateur se remémore cette chanson en fumant un cigare en l’honneur de son premier braquage, déplorant de ne pas avoir eu à utiliser son flingue.
- Sid Vicious est dans cette nouvelle le surnom du gros bonnet de la mafia de l’est parisien. Dans la « vraie vie » Sid Vicious (de son vrai nom, John Simon Ritchie) est l’une des icône du punk, chanteur et bassiste des Sex Pistols, décédé à 21 ans (en 1979) d’une overdose d’héroïne.
Roadhouse Blues
- The Doors – Roadhouse Blues (face B de You make me real, et 1er titre de l’album Morrison Hotel, 1970). Toute la nouvelle est ponctuée par des paroles extraites de cette chanson des Doors et le récit avance en même temps que celle-ci en un parallèle à la fois violent et poétique.
Selon la légende, Jim Morrison était bourré quand il chantait des chansons Blues. Roadhouse Blues appelée « the ultimate bar song » continue à être jouée en fin de soirée par les groupes de bars un peu partout dans le monde.
Paresseux
Dans cette nouvelle la musique a un rôle essentiel : elle rappelle des souvenirs précis, ou presque…
Elle est au centre d’un rituel dominical instauré entre le narrateur et sa fille : pendant que papa bricole la petite s’occupe de la playlist en choisissant au hasard un album dans la colonne à CDs, mais l’auteur évoque aussi l’évolution des supports, des technologies et des habitudes liées à celles-ci (K7, CD, via internet).
L’album mis en avant est celui du groupe Noir Désir – 666.667 Club (666.667 Club, 1996) et surtout la chanson Lazy.
666.667 Club est le 5ème album studio du groupe. Son nom est issu d’un concours entre les membres du groupe, qui en cherchant à savoir lequel jouerait le plus rapidement sur un clavier se sont chronométrés avec un métronome. Tous arrivent à 666 auquel est ajouté 667 pour ne pas se limiter au chiffre du Diable.
- Noir Désir – 666.667 Club. Le père reconnait le titre « dès les premières sonorités indiennes ». Il se revoit des années en arrière dans sa voiture à « se casser les cordes vocales pour approcher de la tessiture rugueuse de Cantat « .
- Les chansons de l’album se suivent ensuite jusqu’à Lazy (je n’ai pas fait figurer dans la playlist ci-dessus les morceaux entre la 1ère piste de l’album 666.667 Club et Lazy qui est le 10ème).
- Le titre Lazy, largement cité, est introduit de la façon suivante : « Coup de poignard dans mon cœur d’ado. Teyssot-Gay me balance sa guitare dans la tronche et Denis Barthe joue de la batterie avec les cruciformes. »
Emmène-moi danser ce soir
- Michèle Torr – Emmène-moi danser ce soir (album éponyme, 1978). Plus de 3 millions de disques de cet album ont été vendus. François Valéry a composé la musique de cette chanson et en a coécrit les paroles avec Jean Albertini.
La clinique de l’amour
- La Cucaracha, chanson traditionnelle espagnole datant au moins du 19ème siècle. La Cucaracha signifie « Le cafard » en espagnol et désignait aussi à l’époque, dans les bas fonds, la marijuana. Introduite au Mexique par les espagnols, elle prit avec le temps une dimension politique.
Dans la nouvelle, de mauvais éthylotests fabriqués en Chine seraient décelables « puisqu’ils jouent La Cucaracha à la trompette quand on souffle dedans ».
Le changeur d’ampoules
- Serge Lama – Les p’tites femmes de Pigalle (Je suis malade, 1973). Cet album permet au chanteur d’obtenir son 1er disque d’or.
- Serge Lama – Je suis malade (Je suis malade, 1973). Serge Lama a écrit cette chanson pour sa femme Michèle.Serge Lama est cité dans cette nouvelle car la mère du « changeur d’ampoules » pense que son fils devrait chanter ses chansons pour séduire les filles.
Rêveries
- Elvis Presley est cité, certainement plus en tant qu’acteur que chanteur puisqu’on le trouve aux côtés de Marilyn Monroe, James Dean et Humphrey Bogart dans un poster pastichant Le Tricheur à l’as de carreau du peintre Georges de la Tour.
- Francis Lalanne – On se retrouvera. Dans la nouvelle, ce titre est diffusé à la radio. Cette chanson est extraite de la bande originale du film français Le Passage de René Manzor (1986).
La caissière du péage de Chatuzange-le-Goubet
- Le narrateur après avoir vu la caissière dont il est « amoureux » se sent comme dans un rêve dans lequel « un petit joueur de flûteau en collant rose interprète la symphonie du bonheur en fa dièse« . Ce morceau n’existe pas, il s’agit d’une pure invention de l’auteur.
Le fils du marchand de miel
- À la fête foraine les « femelles (…) s’habillaient comme Bonnie Tyler alors que la mode était déjà à Madonna«
- La tête d’Elvis Presley (entre autres) se trouve sur des étuis à cigarettes en métal.
- Scorpions – Wind of Change (Crazy World, 1990). Des paroles de la chanson sont citées et le morceau est diffusé lors d’un mariage. La chanson a été composée par Klaus Meine, le chanteur du groupe Scorpions. Les paroles lui ont été inspirées par le Moscow Music Peace Festival (1989), premier festival de rock occidental donné dans le bloc soviétique auquel le groupe participa.
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La cour des innocents est paru en mars 2014 aux éditions Paul&Mike.
Delphine
Créatrice du site // Rédactrice
Créatrice, rédactrice et CM du site. Passionnée de musique, fan de LCD Soundsystem (mais pas que). J'aime la lecture, le ciné, les expo, le street art et les voyages !