Le livre :

Pierre Briançon - Romance in the darkRomance in the Dark de Pierre Briançon est un livre en anglais évoquant la liaison supposée entre Orson Welles et Billie Holiday. Tout débute au printemps 1941 à New York lorsque la chanteuse de jazz surnommée « Lady Day » se rend dans le restaurant de Canada Lee, un acteur jouant à l’époque dans la pièce Native Son, mise en scène par Orson Welles. Suite à cette première rencontre, l’interprète de jazz et le « boy wonder » vont se croiser par intermittence jusqu’à l’été 1943. Dans son autobiographie Lady Sings the Blues publiée en 1956, Billie Holiday évoque Orson Welles de façon très évasive, permettant toutes les spéculations possibles sur la nature de leur relation.

Dans Romance in the Dark, Pierre Briançon tente de réunir les pièces du puzzle en optant pour une méthode originale : chaque chapitre du livre est dédié au témoignage d’une personne proche d’Orson Welles ou de Billie Holiday livrant sa version sur les faits de l’époque et le rapprochement – réel ou fantasmé  – entre les deux artistes, âgés de 26 ans lors de leur première rencontre. On découvre ainsi dans ce roman les souvenirs de l’entourage de Welles – Everett Sloane, Jack Moss, Cy Endfield ou encore Louis Dolivet – et des fidèles de Lady Day – Shad Collins, Jimmy Monroe, Ivie Anderson…

Cette collection d’interviews croisées et d’avis parfois contradictoires sur la réalité de cette romance rappelle la quête de Jerry Thomson, le journaliste chargé de découvrir la signification du mot « Rosebud » prononcé juste avant sa mort par Charles Foster Kane dans le film Citizen Kane (1941). Un clin d’œil qui n’a rien d’étonnant puisque Pierre Briançon est lui-même journaliste – à Reuters Breakingviews à Londres – et cela se ressent dans ce roman, basé sur une recherche documentaire très approfondie. Le livre s’accompagne d’ailleurs d’un site en ligne éponyme proposant divers documents : photos, articles de presse et même les fichiers originaux du FBI sur Orson Welles, suspecté à l’époque – à tort comme beaucoup d’autres – d’être communiste par l’agence gouvernementale.

Romance in the Dark est une saisissante virée dans l’Amérique du début des années 40, une société dont le racisme ambiant a pu jouer sur la nécessité pour Billie Holiday et Orson Welles de garder secrète leur relation – en plus du fait que le réalisateur était à l’époque en couple avec l’actrice Dolores Del Rio. Le climat de ségrégation délétère dont a été victime la chanteuse et contre lequel le metteur en scène aux positions très progressistes s’est souvent indigné est un sujet de combat commun qui a pu les réunir. Le roman retrace l’ascension de Billie Holiday en faisant revivre la scène jazz de l’époque et dévoile également l’intérêt de Welles pour cette musique. Celui-ci souhaitait d’ailleurs inclure dans son projet de film It’s All True un récit sur le jazz ayant pour titre Story of Jazz. Basé sur la vie de Louis Armstrong – qui aurait joué son propre rôle -, le film devait bénéficier d’une bande son composée par Duke Ellington, le rôle féminin principal aurait été tenu par Hazel Scott et la participation de Billie Holiday aurait également été envisagée. Finalement Story of Jazz n’a jamais vu le jour et It’s All True a malheureusement rejoint les nombreux projets non terminés par Orson Welles et n’existe que sous la forme d’un documentaire éponyme sorti en 1993, monté à partir des images ayant survécu.

Avis :

Cette Romance in the Dark mélange avec habilité réel et fiction et propose un récit captivant qui entretient le mystère entourant la relation entre les deux icônes. Le roman, bien documenté, devrait satisfaire les adeptes du réalisateur et/ou de la chanteuse ainsi que les lecteurs curieux souhaitant découvrir ces deux artistes hors du commun. Les consommatrices (consommateurs ?) de journaux people avides de voyeurisme seront probablement déçus par le doute qui est maintenu sur ce qui s’est réellement passé – ou non -, les autres lecteurs apprécieront le parti pris de l’auteur qui ne cherche pas à inventer des scènes entre les deux supposés amants.

A flame grew from just a spark
When I found romance in the dark with you…

Paroles du titre Romance in the Dark

Musique :

Comme à notre habitude la playlist disponible ci-dessous reprend uniquement les titres dont les interprètes sont clairement indiqués dans le livre, elle contient en majorité des morceaux de Billie Holiday. Le site Romance in the Dark mis en ligne par l’auteur propose une bande son du roman  avec quelques titres, interviews et extraits de films concernant certains protagonistes du livre, il s’agit d’un complément idéal à notre playlist.

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Playlist :
Les références musicales sont classées selon l’ordre d’apparition dans le livre, les noms des artistes évoqués (chanteurs et musiciens) sont indiqués à la fin de la liste.

  • La chanteuse Diana Ross est évoquée. Elle joue Billie Holiday dans le film Lady Sings the Blues (1972) adapté de l’autobiographie éponyme. Le film et notamment la prestation de Diana Ross sont très critiqués dans Romance in the Dark.
  • Billie Holiday – All of Me, Georgia on My Mind et Romance in the Dark (1941)
  • Count Basie – Rock-a-Bye Basie (1939-1940)
  • Billie Holiday – Strange Fruit (1939), Danny BoyGod Bless The Child (1941)
  • Le groupe de jazz The Jitterbug est évoqué. Il s’agit du groupe mené par Canada Lee qui a été musicien, jockey et boxer avant de devenir un acteur pionnier des rôles d’afro-américains.
  • La pièce de Duke Ellington Jump for Joy, créée le 10 juillet au Mayan Theatre de Los Angeles, est citée. La chanson-titre donnera lieu à deux versions 78 tours : l’une chantée par Herb Jeffries, et l’autre par Ivie Anderson.
  • Billie Holiday – He’s funny that way (1937)
  • Duke Ellington feat. Ivie Anderson – Stormy Weather (1933)
  • Duke Ellington  – Don’t get around much anymore (1940)
  • Frank Sinatra – My Way (1969)
  • Le musical Grease est évoqué alors qu’il joue au Royale à New-York.
  • Billie Holiday – I Gotta Right to Sing the Blues (1939)
  • Le titre Conga Honga est évoqué. Je n’ai pas retrouvé la référence de ce morceau.
  • Billie Holiday – Love Me Or Leave Me et Wherever you are (1941)
  • Billie Holiday indique à son groupe quel titre elle souhaite interpréter avec un seul mot : « Romance, Pennies, Jeepers, Gloomy, Lover… » Romance correspond à Romance in the Dark, Pennies à Pennies from Heaven (1936), Jeepers à Jeepers Creepers, Gloomy à Gloomy Sunday (1941), Lover correspond très probablement à Lover Man (Oh, Where Can You Be?) (1944). Billie Holiday a également enregistré le titre Lover Come Back to Me mais en 1952, ce qui rend la référence moins probable. Le titre est d’ailleurs cité plus loin dans le livre.
  • Billie Holiday – Trav’lin’ Light (1942), My Man (1937), My Old Flame (1944), Solitude (1941), Fine and Mellow (1939) et Lover Come Back to Me (1952). My Man est l’adaptation de Mon homme, une chanson française chantée par Mistinguett en 1916.
  • Cary Verjano and Bola de Nieve (piano) – Devuélveme Mis Besos, Tu No Sospechas, No Quiero Que Me Odies et El Manisero aka The Peanut Vendor.
  • Autres artistes et groupes cités dans le livre : Una Mae Carlisle, Clyde Hart, Bill Coleman, Django Reinhardt, Teddy Hill, Dicky Wells, Dizzy Gillepsie, Fats Waller, Lester Rallington Collins, Lester Young, Cab Calloway, Lena Horn, Buddy Johnson, Louis Armstrong, Bunk Johnson, Ruby Helena, Lionel Hampton, Teddy Wilson, Artie Shaw, Hazel Scott, Jerry Colonna, Harry Belafonte, Curtis Mosby’s Blue Blowers, Leslie Bisco, Ceele Burke, Dorothy Dandridge, Katherine Dunham, Jimmie Lunceford, Benny Goodman, Charlie Christian, Joe Springer, Charlie Barnett, Oscar Pettiford, Roy Harte, Adolfo Guzman et Israel Lopez.

Si vous désirez en savoir plus sur Orson Welles, vous pouvez consulter The Ultimate Orson Welles Timeline (en anglais).

Romance in the Dark est disponible en anglais au format numérique sur Amazon depuis mai 2014.

Marco

Marco

Rédacteur

Chroniqueur pour Shut Up and Play The Books ! et Citazine (cinéma), je peux également faire des sites Internet sur Wordpress et du community management. Intérêts : Orson Welles, médias, cinéma, #moviequotes, loutres et plus si affinités.
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